C’est à partir d’une observation passive d’un environnement immédiat bien concret, généralement le regard orienté vers le sol, que Mélanie Myers a organisé l’espace de la Galerie UQO avec des objets et des dessins, comme autant de témoins de l’aménagement, des incitatifs et du confort qui régulent les déplacements quotidiens.
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Jusqu’à ce que le lieu devienne improbable
Jusqu’à ressentir, pendant un très bref instant, l’impression d’être dans une ville étrangère, ou, mieux encore, jusqu’à ne plus comprendre ce qui se passe ou ce qui ne se passe pas, que le lieu tout entier devienne étranger, que l’on ne sache même plus que ça s’appelle une ville, une rue, des immeubles, des trottoirs…
(Georges Perec, Espèces d’espaces, 2000, p.105)
C’est à partir d’une observation passive d’un environnement immédiat bien concret, généralement le regard orienté vers le sol, que Mélanie Myers a organisé l’espace de la Galerie UQO avec des objets et des dessins, comme autant de témoins de l’aménagement, des incitatifs et du confort qui régulent les déplacements quotidiens. Prenant en considération à la fois la fatalité du vivre ensemble, mais aussi la négociation dans le partage d’un territoire, l’artiste met au jour des systèmes instaurés et des méthodes dissimulées principalement par les règlementations municipales. Dans l’objectif de la bonne gestion des lieux, Mélanie Myers déplace les stratégies des infrastructures de la cité vers la galerie, tels des incitatifs permettant d’aménager, de délimiter et d’installer.
L’exposition repose sur la construction d’un parcours qui n’aura pas lieu, sur une fracture dans la reproduction des espaces urbains et sur une forme d’échec de la contemplation. Bien que les structures qui prennent place en galerie puissent ressembler à certaines interventions urbanistiques, elles participent plutôt, par le détournement qu’opère l’artiste, à souligner certaines inepties inhérentes au transfert de la ville vers la galerie. Les aménagements incitatifs sont aussi très présents dans une série de dessins grand format qui viennent souligner la brisure dans le rapport d’échelle entre le réel et le représenté. L’artiste participe ainsi, comme le dit Perec, à rendre le lieu improbable.
Mélanie Myers vit et travaille à Hull, Gatineau. Elle est titulaire d’une maîtrise en arts visuels du Nova-Scotia College of Art and Design (2013), et d’un baccalauréat en art et design de l’Université du Québec en Outaouais (2008). En production, elle réaménage l’espace et décrit des situations dans les médiums de l’installation et du dessin. Sa démarche touche à divers champs d’intérêt : la sécurité, la réalité, l’erreur et la classe moyenne. Ses projets ont été supportés par le CALQ et diffusés dans plusieurs galeries principalement au Canada notamment à AXENÉO7, Forest City Gallery et Anna Leonowens Gallery. Elle a fait des résidences au Centre Bang et à la Maison Scott Fairview (2017) et travaille comme chargée de projet à AXENÉO7.
L’artiste tient à remercier le Conseil des arts et des lettres du Québec, la Ville de Gatineau, A.M.S. Entreprises, le Centre Bang et AXENÉO7.
Détentrice d’un doctorat en études et pratiques des arts de l’Université du Québec à Montréal (2024), Marie-Hélène Leblanc est directrice et commissaire de la Galerie UQO à l’Université du Québec en Outaouais depuis 2015. Sa pratique commissariale l’a amenée à produire plus d’une trentaine de projets présentés dans diverses structures d’exposition au Québec, au Canada et en Europe. Considérant l’exposition comme médium, elle se définit comme commissaire-faiseuse d’expositions-autrice-praticienne-chercheuse. Gaspésienne, elle vit à Gatineau.